Découvrez les dessous des élections TPE 2024
ÉLECTIONS TPE 2024 : vous avez dit démocratie et modernité ?
Le fameux « tournant technologique et social » ne serait-il pas en train de virer au désastre ?
Nous ce qu’on voit, c’est que petit à petit, sous couvert de modernité, on perd en démocratie… Y compris dans le monde du travail.
Retour sur les anciennes pratiques démocratiques
Il n’y a pas si longtemps rappelez-vous, les élections des conseillers aux Prud’hommes se tenaient dans les écoles de nos communes : quelques bulletins, un isoloir avec une urne et hop, l’affaire était réglée… Or, cette élection a été supprimée pour permettre aux syndicats de désigner directement les conseillers.
Ensuite, Sarkozy nous a pondu (avec l’appui bienveillant de la CFDT et de la CGT) la loi sur la représentativité des syndicats.
Et les élections TPE (moins de 11 salariés) ont été mises en place. Pour permettre aux salariés des très petites entreprises de voter pour des organisations syndicales.
Et là, pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Ces élections professionnelles vont-elles devenir un cas d’école (sans jeu de mot) ? Jugez vous-même.
Un vote électronique controversé
Le gouvernement a confié à une société privée, Voxaly-Docapost l’organisation de ce scrutin mixte : vote par correspondance par papier, plus vote électronique par ordinateur ou smartphone.
Quand on va sur leur site, ça en jette : « Fluidifiez l’organisation de vos élections grâce au vote électronique ». Le logo et les couleurs vous font penser à La Poste, vous êtes en confiance, vous êtes bien.
- Et pourtant, sous couvert de modernité, ce sera plutôt comme on le verra : opacifiez un max vos élections grâce au vote électronique !
- Et pourtant, on nous affirme que ladite société n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’elle pratique cet exercice depuis 12 ans, soit 3 scrutins des TPE.
Mais alors, il faudra qu’on nous explique pourquoi on a constaté autant de bugs et de lacunes au cours des phases de mise en place, de contrôle et de dépouillement ?
Découvrez les dessous des élections TPE 2024
Retour sur une élection nationale qui concerne quand même quelques 5,3 millions de salariés.
Excusez du peu.
Dysfonctionnements et bugs à répétition
Lundi 25 novembre 2024, ministère du travail.
Tandis que l’ouverture national du vote est planifiée pour 15h, une alarme se déclenche à 11h.
On nous rassure avec des sourires gênés en nous disant que c’est « un problème en interne », qu’il n’y a pas eu « d’attaques extérieures » et que la « cause inconnue » sera investiguée dans les jours à venir.
Ah.
Un expert indépendant, présent à cette pompeuse « cérémonie de scellement des urnes électroniques », nous dit cependant qu’il est très peu probable que l’on arrive à déterminer avec certitude ce qui a activé cette alarme du système…
L’équipe de Voxaly-Docapost procède donc à un « réalignement de la mémoire »… Dans le flou général.
La « cérémonie » reprend son cours mais voilà qu’à 14h12 (3/4 d’heure avant le début du vote) : disparition en direct au tableau d’affichage de l’une des 4 empreintes des serveurs.
Bzzzzz (une mouche vole).
Voxaly excuse ce nouveau problème en affirmant que le « contrôle aléatoire » du programme (une fois par heure le temps des élections) s’est déclenché exactement au même moment que notre contrôle manuel test de la cérémonie.
Incroyable. Une chance sur combien que ça arrive ça ?
L’équipe de Voxaly est donc contrainte de lever les scellements des urnes électroniques, recontrôler leur intégrité et reposer les scellements…
On nous dit que tout est ok, on les croit sur parole bien sûr…
Rappel du contexte : Le vote se déroule du 25 novembre au 9 décembre et la « cérémonie de dépouillement » a lieu le 19 décembre (pour prendre en compte les votes par correspondance), toujours avec les équipes du ministère du travail et de Volaxy…Votre syndicat préféré est également présent naturellement.
Et là, dès le matin, nouveau bug…
Cette fois, c’est dans le fichier des émargements : 6 463 personnes ne peuvent être identifiées dans le vote par correspondance et, donc, ne peuvent émarger.
Pourquoi, nous demanderez-vous.
Tout simplement (lol) parce que le système ne reconnait pas les identifiants numériques des salariés qui commencent par un ou plusieurs zéros.
Ces identifiants étant attribués de manière « aléatoire » et devant faire 15 caractères chacun, comme 6 463 d’entre eux commencent par des zéros, du coup, le système les supprime et du coup il n’y a plus les 15 caractères requis.
(D’un point de vue théorique, le zéro est parfois exclu des ensembles de nombres naturels en mathématiques, car il ne possède pas de factorisation première et ne fonctionne pas bien avec certaines fonctions mathématiques)
On demande très sérieusement à Voxaly s’ils « découvrent » le problème des zéros.
Et comment ça se fait que le vote blanc test n’a pas détecté ce problème.
Ils nous répondent, dépités, que lors du vote blanc test, qui avait été simulé par 160 électeurs réels volontaires, aucun d’entre eux n’avait d’identifiant commençant par 0 et que donc, l’anomalie n’avait pu être détectée.
On croit rêver.
Et nous voilà donc obligés d’attendre, encore et encore, le temps que soient réalisés un audit de code, le changement du programme dans la base de données et que soient reprises les empreintes numériques.
C’est long.
Et enfin, roulements de tambours, on nous rappelle dans la salle car les résultats des TPE sont attendus dans toute la France pour cet après-midi du 19 décembre 2024 !
Et on est l’après-midi justement, bien avancé d’ailleurs.
Mais là encore, il y a un problème. Et un gros.
Contrairement à tous les autres bugs précédents où Voxaly et l’expert indépendant se voulaient rassurants, là on sent la cata.
Environ 63 000 votes sont interprétés à tort comme des votes nuls, ce qui rend le vote par correspondance inexploitable !
Voxaly est effondrée, l’expert indépendant prend le relais : une information supplémentaire inattendue est apparue, un point-virgule et un zéro (bigre, encore un zéro !) dans on ne sait plus quel champ, ce qui rend encore ces votes illisibles.
L’équipe du ministère fait taire l’expert qui en dit trop, nous fait grâce de « rester jusqu’à 23h ou minuit » et reporte donc la proclamation des résultats au lendemain ! Une première.
Dans un brouhaha d’exaspération, chacun exprime son mécontentement, car les emplois du temps ne sont pas extensibles sur un claquement de doigts.
Donc le lendemain vendredi 20 décembre, rebelote, le Syndicat des Gilets Jaunes est dans la place dès potron-minet.
L’équipe de Voxaly-Docapost a le teint blafard et les yeux cernés.
L’équipe du ministère fait la gueule.
Et hop, encore un petit bug pour la route : une imprimante n’arrive soudain plus à imprimer.
Même le matériel est au bout du rouleau.
Mais finalement ça y est, après nous avoir béatement rassurés sur l’intégrité du scrutin malgré les nombreux dysfonctionnements, les résultats arrivent à l’écran.
Les résultats de l’élection syndicale 2024 des salariés des TPE et des employés à domicile
Et là on a envie de dire : tout ça pour ça ?!?
La participation 2024 en chute libre
Avec un taux de participation global de 4,07 % sur 5 380 351 inscrits, quelle représentativité peut réellement dégager d’un tel suffrage ?
Les coûts et la transparence en question
Le Syndicat des Gilets Jaunes reprend le micro au moment des observations (destinées à être consignées dans le procès-verbal, on y veillera) pour affirmer que d’une part, personne n’a répondu à ses questions sur l’utilisation de l’argent public dans cette affaire :
- combien toute cette opération de vote coûte-t-elle aux contribuables ?
- quels sont les montants des subventions publiques attribuées aux organisations syndicales ?
- quelles sont les clés de répartition de ces subventions publiques ?
(Nous on les refuse ces subventions, mais il est normal que vous sachiez où vont vos impôts).
et que d’autre part :
- nous avons constaté sur le terrain un trop grand nombre de salariés qui n’avaient pas reçu l’information, l’identifiant et le mot de passe pour pouvoir voter,
- ce mode de scrutin électronique ne convient manifestement pas aux salariés et il conviendrait de refaire des élections physiques, BEAUCOUP PLUS SIMPLES, VISIBLES ET SURES, dans les écoles de nos communes.
Le ministère du travail prend bien note de nos remarques et questions, sans y répondre, comme d’habitude.
Parce qu’ici, on n’a pas l’habitude de se justifier sur l’utilisation de l’argent public.
Il va falloir que ça change ça. Et bien d’autres choses.
Une alternative : le retour au vote physique
Car nous retenons de tout cela que ce modèle de scrutin n’est absolument pas fiable et qu’il n’est pas transparent pour les citoyens.
Quand on pense que la volonté de Docapost est de généraliser le vote électronique aux élections nationales, on a de quoi s’énerver.
Cette usine à gaz fait clairement partie du story-telling que les lobbies veulent nous vendre, pour mieux nous enfumer.
Nous, ce que nous voulons, c’est du contrôle citoyen sur tous les organes clés du pouvoir et de la Démocratie directe !
Dans notre optimisme mesuré, nous constatons quand-même que le Syndicat des Gilets Jaunes, créé il y a seulement 4 ans, sans subvention et sans avoir pu faire campagne, se place à la 9ème place sur 25 syndicats à l’élection TPE 2024ction.
Ce résultat démontre à l’évidence tout le potentiel de notre modèle syndical : nous avançons vite et fort.
Et pour la démocratie, la transparence et la justice : nous ne lâcherons RIEN !
AHOU